Cancer du pancréas

Ce document est inspiré des feuilles d’information de la Fédération Francophone de Cancérologie digestive. Il est destiné à l’information des malades, de leurs proches et «du grand public». Il n’est pas exhaustif. N’hésitez pas à interroger vos médecins en cas d’incompréhension ou si vous avez besoin d’informations complémentaires.

Question : le cancer du pancréas, c’est quoi ?

Les cancers du pancréas les plus fréquents correspondent aux adénocarcinomes pancréatiques. Ils doivent être distingués des autres types de tumeurs malignes du pancréas et en particulier des tumeurs endocrines. Elles sont beaucoup plus rares et il n’en sera pas question ici.

Ils sont localisés le plus souvent au niveau de la partie droite du pancréas appelée «tête» qui est traversée par le canal cholédoque. Ce dernier draine la bile produite par le foie et la conduit dans le duodénum qui est en contact étroit avec la tête du pancréas comme indiqué sur le schéma. Plus rarement, les cancers se développent au niveau de partie centrale ou de la partie gauche du pancréas, appelées respectivement «corps» et «queue» du pancréas.

Question : le cancer du pancréas, c’est fréquent ?

La fréquence du cancer du pancréas a augmenté au cours des dernières décennies. Il existe une très légère prédominance masculine. Ceci place le cancer du pancréas au 10ème rang des cancers chez l’homme (après les cancers de la prostate, du poumon, du côlon, de la sphère ORL, de la vessie, les lymphomes, les cancers du rein, du foie et de l’estomac) et au 9ème rang des cancers chez la femme (après les cancers du sein, du côlon et du rectum, du poumon, du corps de l’utérus, de la thyroïde, le cancer de l’ovaire et le mélanome malin cutané).

Il s’agit dune maladie survenant généralement dans la deuxième partie de la vie puisque 70 % des cas sont diagnostiqués après 65 ans et que 43 % des cas le sont après l’âge de 75 ans. L’âge médian au diagnostic est de 74 ans.

Les facteurs de risques reconnus correspondent au tabagisme, à la pancréatite chronique, au diabète de la maturité (dit de type II) évoluant depuis plus de 10 ans et à l’existence d’un et a fortiori de plusieurs antécédents familiaux de cancers du pancréas (agrégation familiale pouvant être le reflet de maladies génétiques de prédisposition, affections rares mais devant être évoquées dans un tel contexte). Enfin, certaines lésions bénignes du pancréas ont un potentiel de dégénérescence. On parle de lésions pré-cancéreuses, qui se présentent le plus souvent sous la forme d’un ou de plusieurs kystes.

Question : quels sont les symptômes du cancer du pancréas ?

Plusieurs circonstances peuvent conduire au diagnostic :

  • Il peut s’agir de l’apparition d’une jaunisse (ou ictère) parfois associée ou précédée par des démangeaisons (prurit). Cette jaunisse a tendance à s’aggraver spontanément et à être accompagnée d’une modification de la couleur des urines (qui brunissent) et des selles (qui s’éclaircissent). Elle est due à l’obstruction du cholédoque qui ne permet plus à la bile de s’évacuer dans le duodénum et est responsable d’une accumulation de la bilirubine dans le sang. Elle est donc principalement observée dans les cancers de la tête du pancréas. L’apparition d’une fièvre et de frissons doit évoquer une infection de la bile en rétention. Il s’agit d’une urgence qui nécessite une prise en charge spécifique en hospitalisation. Il est important de noter que la jaunisse n’est pas spécifique du cancer du pancréas et qu’elle peut être observée dans un grand nombre d’autres maladies du pancréas, des voies biliaires, du foie ou des globules rouges.
  • Parfois, ce sont les douleurs abdominales qui donnent l’alerte. Il s’agit généralement de douleurs localisées dans la partie haute de l’abdomen et irradiant vers le dos, sourdes, évoluant depuis plusieurs semaines ou mois, non soulagées par la prise d’anti-spasmodiques intestinaux. Des douleurs intenses et d’apparition brutale évoquent la possibilité d’une pancréatite aiguë, c’est-à-dire d’une inflammation du pancréas en amont de la tumeur, qui est une autre circonstance de découverte, plus rare, du cancer du pancréas.
  • Le diagnostic doit également être évoqué devant l’apparition d’un diabète ou d’une phlébite en dehors de toute circonstance favorisante (plâtre, alitement …).

Ces symptômes peuvent être associés à une altération de l’état général caractérisée par une grande fatigue, un dégoût des aliments et un amaigrissement.

Enfin, il est possible que le cancer soit totalement asymptomatique et que le diagnostic soit porté, soit de façon fortuite à l’occasion d’un examen radiologique (scanner ou échographie le plus souvent) réalisé pour une toute autre raison, soit dans le cadre d’un dépistage systématique chez des sujets à risque particulier.

Question : comment dépiste-t-on le cancer du pancréas ?

Contrairement aux cancers colorectaux et aux cancers du sein chez les femmes, il n’y a pas d’indication de dépistage systématique du cancer du pancréas dans la population générale compte-tenu notamment de sa relative rareté.

Un tel dépistage n’est envisagé que dans les rares situations associées à une majoration franche du risque : lésion pré-cancéreuse du pancréas, maladie génétique de prédisposition… Ses modalités (nature et périodicité des examens) sont mal définies.

Question : comment diagnostique-t-on le cancer du pancréas ?

Les examens radiologiques (scanner principalement, IRM) et endoscopiques (écho-endoscopie) ont une place centrale dans la stratégie diagnostique du cancer du pancréas et doivent être demandés en cas de symptôme d’appel.

La prise de sang avec dosage d’un marqueur (protéine) appelé CA19 .9 peut également être utile.

Cependant, le diagnostic ne peut être affirmé qu’après examen au microscope de la totalité de la tumeur ou d’un fragment de celle-ci obtenu par biopsie. Cette dernière n’est généralement pas indiquée en cas de petite tumeur accessible à une chirurgie et dont l’aspect radiologique est très caractéristique. Elle doit être réalisée dans toutes les autres situations, guidée par le scanner ou au cours d’une échoendoscopie selon les cas. L’examen au microscope (on parle d’étude histologique) permet à la fois de confirmer le diagnostic de cancer et d’éliminer les formes rares évoquées dans l’introduction (autrement dit de confirmer qu’il s’agit d’un adénocarcinome).

Les examens radiologiques ont également l’intérêt de juger de l’extension de la maladie qui conditionne les modalités du traitement. En pratique, on distingue les tumeurs localisées et de petite taille, les tumeurs avec extension loco-régionale et les tumeurs associées à une dissémination à distance, c’est-à-dire à des métastases.

Question : quel est le pronostic du cancer du pancréas ?

Malgré les progrès réalisés au cours des dernières décennies, le pronostic du cancer du pancréas reste globalement sombre. Il dépend principalement de la taille de la tumeur et de son extension au moment du diagnostic.

Seule la chirurgie, qui n’est possible que pour des tumeurs de petite taille et de localisation favorable c’est-à-dire dans une minorité des cas, offre une possibilité de guérison. Celle-ci n’est cependant pas garantie en raison d’un taux élevé de récidives. L’administration d’une chimiothérapie après la chirurgie permet de réduire significativement ce taux.

Lorsque la chirurgie n’est pas possible ou en cas de récidive après chirurgie, les objectifs du traitement sont de limiter la progression de la tumeur ou de la faire régresser, au moins transitoirement, et de soulager les symptômes pénibles.

Question : quel est le traitement du cancer du pancréas ?

Les indications thérapeutiques théoriques dépendent principalement de la localisation, de la taille et de l’extension de la tumeur au moment du diagnostic. Elles doivent être modulées pour chaque cas en fonction du contexte spécifique : âge «physiologique», antécédents médicaux et chirurgicaux, souhaits et contraintes du patients

En pratique, la stratégie thérapeutique la plus adaptée pour un individu donné est définie dans le cadre d’une réunion de concertation pluri-disciplinaire à laquelle participent les chirurgiens et les médecins de différentes spécialités (cancérologues, gastro-entérologues, radiothérapeutes, radiologues, anatomopathologistes …) et qui a pour objectif d’établir un plan personnalisé de traitement.

Traitement de la jaunisse :

Il est prioritaire sur tous les autres car la rétention de bile dont elle témoigne est souvent associée à d’importantes démangeaisons. Par ailleurs, elle retentit sur la fonction du foie et comporte un risque de surinfection grave. Lorsque la chirurgie est possible et réalisable dans un délai relativement court, elle permet de régler le problème et il n’y a pas de geste spécifique à envisager au préalable.

Dans toutes les autres situations (chirurgie différée qu’elle qu’en soit la cause ou chirurgie non réalisable), il est nécessaire de mettre en place sans délai une prothèse dans le canal cholédoque afin de lever l’obstruction et de permettre un drainage satisfaisant de la bile. Cette prothèse ou «stent» est mise en place, le plus souvent, à l’occasion d’une endoscopie, c’est-à-dire en utilisant un endoscope passant par la bouche, sous anesthésie générale.

Traitement chirurgical :

La possibilité d’une exérèse chirurgicale complète de la tumeur doit toujours être envisagée puisqu’elle seule permet d’espérer une guérison. Une telle chirurgie n’est cependant possible qu’en l’absence de localisation métastatique et, pour les tumeurs localisées, uniquement en cas de localisation favorable et en l’absence d’envahissement de certaines structures de voisinage (les artères notamment). Il est également nécessaire que l’état général soit compatible avec la réalisation d’une chirurgie qui reste lourde et délicate, en particulier pour les cancers de la tête du pancréas. La prise en compte de l’âge du malade et surtout de ses antécédents médicaux est donc essentielle, de même que l’avis du médecin anesthésiste.

Au total, la chirurgie n’est envisageable que dans une minorité de cas. Elle doit être réalisée dans un centre expert. La mortalité liée à la chirurgie est faible (inférieure à 6 %), mais non nulle. Par ailleurs, des complications sont possibles après la chirurgie qui peuvent conduire à une hospitalisation prolongée. La séquelle la plus fréquente correspond à une diarrhée associée à modification de la consistance et de l’aspect des selles qui deviennent plus «grasses». Elle est due à une fonction insuffisante du pancréas restant et peut être améliorée ou corrigée par l’ingestion d’enzymes pancréatiques sous la forme de gélules. Un diabète lié à une diminution de la production d’insuline est également possible, en particulier en cas d’exérèse du corps et de la queue du pancréas.

La chimiothérapie :

Elle correspond à l’élément essentiel du traitement en l’absence de chirurgie possible (après mise en place d’une prothèse en cas de jaunisse). Dans une telle situation, elle ne permet pas d’espérer une disparition complète de la maladie ni une guérison mais elle a pour objectif de faire diminuer le volume de la tumeur ou de bloquer son évolution, au moins transitoirement. Différentes molécules de chimiothérapie, administrées seules ou en association, ont une efficacité démontrée dans le traitement du cancer du pancréas. Il s’agit en particulier de la gemcitabine ou de l’association de 5-fluorouracile, d’oxaliplatine et d’irinotécan. Elles sont administrées par voie intra-veineuse à travers un petit réservoir appelé « port-a-cath », connecté à une veine de gros calibre, mis en place au préalable sous anesthésie locale. Leurs effets indésirables potentiels sont variables et doivent être explicités. Des mesures spécifiques sont parfois indiquées pour les prévenir ou les atténuer. Ils justifient la mise en place d’une surveillance étroite, clinique et par prise de sang. Ils peuvent conduire à modifier le schéma d’administration en cas de mauvaise tolérance : diminution des doses, espacement des cures. L’évolution de la situation clinique, les résultats de la prise de sang et les données du scanner sont les principaux éléments permettant de juger de l’efficacité de la chimiothérapie. Les examens sont en général renouvelés tous les 2 à 3 mois. Lorsque la chimiothérapie est efficace et correctement tolérée, sa prescription est renouvelée. Au contraire en cas d’échec et/ou d’intolérance, la chimiothérapie est interrompue et éventuellement remplacée par une autre lorsque l’état général est compatible et que d’autres agents de chimiothérapie d’efficacité démontrée restent disponibles.

L’administration d’une chimiothérapie est également recommandée après exérèse complète d’un cancer du pancréas. On parle alors de chimiothérapie «adjuvante» qui permet de diminuer le risque de récidive. Le produit utilisé correspond généralement à la gemcitabine (GEMZAR ®). Il est administré sous la forme d’une perfusion intraveineuse hebdomadaire d’une demi-heure trois semaines sur 4 pendant 6 mois. La tolérance est généralement satisfaisante.

La radiothérapie :

La radiothérapie a peu de place dans le traitement du cancer du pancréas. Elle peut être discutée dans le traitement des formes étendues sur le plan locorégional et non opérables (soit d’emblée soit récidivant après une chirurgie), généralement après une séquence de chimiothérapie et éventuellement en association avec celle-ci. Cette indication n’est pas consensuelle. Elle doit donc être discutée au cas par cas, à l’occasion d’une réunion de concertation pluri-disciplinaire. Par ailleurs, la radiothérapie est parfois utile pour le contrôle de certains symptômes douloureux.

Le traitement des symptômes :

Le traitement de la jaunisse a déjà été abordé. En ce qui concerne la douleur, de nombreux moyens médicamenteux ou non sont actuellement disponibles pour la soulager. Enfin, une aide nutritionnelle peut être proposée si nécessaire, de même qu’un soutien psychologique au malade et à sa famille. Les soins de confort peuvent être prodigués, soit à l’hôpital ou dans une autre institution, soit à domicile grâce à l’intervention du médecin référent, d’une infirmière et éventuellement d’autres professionnels (psychologues, kinésithérapeutes …) et à la livraison du matériel nécessaire.

Recherche et essais thérapeutiques :

La recherche relative au traitement du cancer du pancréas est très active et de nombreux essais thérapeutiques sont en cours qui visent à évaluer l’efficacité de nouveaux médicaments ou de nouvelles stratégies. Ces essais sont très «encadrés» et la participation n’est envisageable que pour les malades dûment informés et volontaires dont le consentement écrit a été obtenu.

REMARQUE IMPORTANTE

Ces informations n’ont pour but de ne fournir que des informations générales et ne doivent pas servir d’aide pour poser un diagnostic ou proposer un traitement pour des cas particuliers. Il est très important de consulter votre médecin pour votre cas particulier.